L’Envol des Mots

Philippe Béhin-Stroud, écrivain public.

L’œil de bœuf


L'œil de bœuf

Dans l'océan des toits, dessous le ciel limpide,
Est, tel un sombre iris, la fenêtre candide,
Ouvrant sur ma jeunesse et les galants émois
D'une gamine blonde, avec un autre moi.

Car alors cette enfant à la chair blanche et tendre
Me donnait sa vertu, consentant à se rendre
À ce brun avatar dont les élans virils
Étaient encore empreints de hâtes malhabiles !

Comme la vie et courte, et l'amour oublié !
De la bruyante rue, son ovale ennuyé
Semble fixer encore quelque horizon lointain
Aujourd'hui disparu, souvenir incertain.

Le jour nouveau s'annonce et la lumière rousse
Égaie la pâle pierre de ses chauds reflets d'ambre.
Dans le verre mouillé, je crois deviner l'ombre
D'un prénom oublié, que hardiment je trousse.

L'espace d'un moment, je suis l'étudiant brun
Qui de ses bras aimants, sans attendre l'étreint
Et je revois encore son sourire juvénile
Quand nous riions ensemble de nos amours fébriles.

Un klaxon abruti dans la rue agitée,
Et le songe s'enfuit, bien loin de nos vingt ans ;
La mansarde est déserte, et sous le toit luisant
De l'œil de bœuf rêveur, la crémone est fermée.

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